Axes de recherche

Projet scientifique (quinquennal 2002-2026)

 

Axe 1 : Alexandrie en devenir : topographie et urbanisme

Les fouilles de sauvetage effectuées en ville par le CEAlex durant la décennie 1992-2002 ont permis d’ouvrir des fenêtres sur l’occupation de la ville et de ses quartiers sur la longue durée et ont fourni une quantité d’informations qu’il convient de traiter et de publier.

Pour la ville des vivants, on souhaite mettre l’accent sur les contextes domestiques d’époque hellénistique (chantier du Cricket Ground), d’époque romaine (chantier du Théâtre Diana) et d’époque médiévale (chantier Fouad), sur les contextes commerciaux d’époque hellénistique (chantier Fouad) et productifs (théâtre Diana), et enfin sur les contextes utilitaires (citerne el-Nabih, époque médiévale).

La poursuite des campagnes sous-marines sur le site du Phare d’Alexandrie permettra d’achever la couverture photogrammétrique du site (1,6 ha ; actuellement 70 % ont été couverts) d’ici 3 à 4 ans. Une fois, les trois volumes promis publiés, les études architecturales à partir des blocs immergés et de leurs copies numériques ont vocation à se poursuivre.

Pour la ville des morts, la préparation de la publication des secteurs inédits de la nécropole du Pont de Gabbari (Nécropolis) est entamée depuis 2020, et sera accompagnée d’un SIG en ligne rendant compte du détail des sépultures tant archéologique qu’anthropologique. L’obtention d’un contrat doctoral en 2021 sur la thématique de l’archéoanthropologie permet de continuer à développer cette thématique sur le cimetière chrétien du chantier Lux daté des vie-viie siècles où une mortalité de crise semble attestée.

L’étude des citernes médiévales Ibn Battuta et Gharaba se place dans une nouvelle approche de la partie ouest de la ville, encore peu connue, visant à préciser le tracé du dernier segment du canal reliant le Nil à Alexandrie sur la longue durée et l’emplacement du port fermé antique (Kibotos). L’étude sur les fortifications d’Alexandrie à l’époque médiévale et ottomane, et particulièrement du fort Qaitbay, sera finalisée.

Les recherches sur la cartographie moderne d’Alexandrie conduiront à la publication de deux volumes qui s’intéressent aussi bien à la production cartographique qu’à ses acteurs. Nous souhaitons également, dans les traces du SIG CairMod développé par l’Unité InVisu, Persée, l’IFAO et l’ENSG et dans la suite du programme CollexPersée EGYNUM, développer un SIG AlexMod qui combinera plans de la ville de la fin du xixe siècle et de la première moitié du xxe siècle, cartes postales de la ville (un millier mis en ligne sur Gallica en 2021, avec métadonnées détaillées) et gazetier des monuments et lieux représentés. Cette action se place dans le groupe de travail 3 – géovisualisation – du consortium Huma-Num DISTAM dont le CEAlex est l’animateur.

Après l’étude d’Alexandrie au moment du bombardement de la ville par les Britanniques et de la profonde modification de son centre urbain en 1882, et d’Alexandrie durant la Première Guerre mondiale, l’impact de la Seconde Guerre mondiale sur l’urbanisme de la ville, sur ses multiples communautés étrangères et la place même de la ville durant le conflit seront étudiés dans le cadre d’une collaboration avec l’Ifao et le LARHRA.

 

Axe 2 : Exploration de la campagne alexandrine et restitution de l’évolution de l’occupation des sols

Une première étape a été franchie dans la constitution de la carte archéologique paléoenvironnementale et patrimoniale de la Maréotide. La mise au point du cadre géomatique diachronique de la région et l’état des lieux nécessaire pour guider les travaux archéologiques est acquise, tout comme la documentation aussi exhaustive que possible de près de 200 sites et la publication proche d’un premier essai archéologique et historique sur l’ensemble de la région. Il convient maintenant de mener à bien les opérations de publications des fouilles des sites d’Akadémia, de la presqu’’île de « Maréa » et du Kôm de la carrière, et des études céramologiques et archéométriques sur les ateliers d’amphores. Il faut aussi poursuivre les tâches de prospection intensives dans cette région soumise à la pression urbaine et industrielle.

Deux axes de recherche ont vocation à être développés. Le premier est une approche archéobotanique de la région, marchant la main dans la main, au niveau des modes de prélèvement et des spécialistes impliqués, avec l’approche archéozoologique, déjà bien développée pour la ville. La seconde approche vise à mieux comprendre les structures agricoles, très spécifiques à la région, les karms (en arabe vignoble), qui se reconnaissent par l’existence de champs talutés pouvant mesurer jusqu’à 3 km de long sur 1 km de large et dotés de fermes et d’installations hydrauliques. Plus de 600 ont été recensés à partir des analyses cartographiques. Il convient d’en dresser une typochronologie afin d’être en mesure de restituer l’exploitation des sols depuis le début de l’époque hellénistique jusqu’au début de l’époque médiévale.

La poursuite des fouilles de Kôm Bahig, avec l’école de fouille destinée aux inspecteurs du Ministère des Antiquités et aux étudiants de l’Université d’Alexandrie permettra à n’en pas douter de mieux comprendre le sanctuaire sans doute d’époque pharaonique qui prenait place sur ce site et qui a été fréquenté jusqu’à la fin de l’époque hellénistique, puis sans doute abandonné et pillé pour construire une nouvelle agglomération, à peu de distance plus au nord, sur les rives du lac Mariout.

 

Axe 3 : Alexandrie près de l’Égypte et au bord de la Méditerranée : production et commerce d’artefacts et de denrées

Dans la perspective de continuer à dresser le répertoire typochronologique de la céramique utilisée à Alexandrie, quatre études doivent être publiées ou menées : conteneurs cinéraires de l’époque hellénistique et romaine, production et consommation de la céramique commune dans le delta occidental à l’époque romaine ; consommation céramique dans l’Alexandrie ottomane ; étude des pipes ottomanes.

Le dossier sur la consommation du verre à Alexandrie depuis sa fondation jusqu’à l’époque ottomane à partir du mobilier issu des fouilles du CEAlex, de la publication de la collection de verres du Musée gréco-romain d’Alexandrie et de celle du Musée éducatif de la faculté des lettres de l’Université d’Alexandrie sera réouvert.

Dans le domaine de la numismatique, sont programmés la fin de l’étude et la publication des monnaies de fouilles du CEAlex mises au jour depuis 2000 et l’intégration de l’ensemble du corpus des monnaies de fouilles du CEAlex dans les portails déjà construits et accessibles au plus grand nombre (Ptolemaic Coins Online et RPC Online), ainsi que la publication de la  collection des monnaies gréco-romaines du Musée éducatif de la faculté des lettres de l’université d’Alexandrie et la poursuite de l’étude de la collection de monnaies d’argent du Musée gréco-romain d’Alexandrie.

La richesse et la diversité des matériaux des ateliers de bijouterie d’époque romaine tardive sur le chantier du théâtre Diana nécessitent une étude d’ampleur réunissant différents spécialistes et disciplines. L’étude archéométrique entamée sur les grenats devra être poursuivie sur les émeraudes et les améthystes en collaboration avec le C2MRF et l’étude de l’atelier de perles de verre, qui fait écho à d’autres découvertes alexandrines, se fera en collaboration avec le Centre Ernest Babelon/IRAMAT.

D’une manière plus large, le CEAlex souhaite s’investir aux côtés de l’Ifao dans un programme diachronique sur les artisanats du feu en Égypte, prêtant une attention particulière à la chaîne opératoire des différents artisanats (céramique, métallurgie, verre, et corollairement fours à chaux) et à leurs structures de production.

Tournée vers la Méditerranée, Alexandrie est aussi un extraordinaire observatoire du commerce des denrées, en particulier dans les conteneurs amphoriques. Après la publication en monographie et en ligne du  corpus des matrices des éponymes rhodiens, est programmée la création d’une collection commune avec l’EFA, Amphores de Méditerranée pour accueillir le corpus des matrices des fabricants rhodiens (447 fabricants, 4 707 matrices en ligne ; 4 volumes ) et un volume d’addenda et de corrigenda, le corpus des matrices des amphores de Chios, le corpus des timbres latins d’Alexandrie et de Délos, le corpus des matrices des amphores de  Cnide, le corpus des matrices de fabricants de Cos.

Enfin, il convient de tirer parti des séries d’analyses chimiques et pétrographiques déjà effectuées sur les céramiques égyptiennes et importées dans le cadre de l’IRN pXRFCUN (2021-2025) pilotè par le CEAlex, qui réunit laboratoires français et étrangers, usant du p-XRF pour la détermination physico-chimique des ateliers céramiques et amphoriques.

 

Axe 4 : Pour une archéologie de l’intime

De nouvelles fenêtres sur les croyances des Anciens seront ouvertes grâce à deux études, l’une sur le Boubasteion d’Alexandrie dont la fouille au début des années 2010 a livré d’exceptionnels ex-voto en forme de chattes en terre cuite ou en pierre et de statues d’enfants datés du tout début de l’époque hellénistique. L’autre sur le décor de la tombe 2 de la nécropole d’Anfouchy, réexaminé grâce aux nouvelles techniques photographiques (exploitation des couches Lab et VIL), qui illustre de manière exceptionnelle les croyances funéraires au milieu de l’époque hellénistique entre allégories d’inspiration toute grecque et iconographie égyptienne.

La mise à disposition de documents sur l’Alexandrie des xixe-xxe siècles qu’il s’agisse d’exemplaires de presse, de livres rares et anciens sur Alexandrie ou de documents iconographiques va se poursuivre sur le site pfe.org et sur le portail Bibliothèques d’Orient. Un des enjeux du prochain quinquennal sera de continuer à développer notre politique de collecte dans l’optique de sauvegarder une mémoire francophone en danger et d’arriver à un catalogue archivistique en ligne des différents fonds, qu’ils relèvent d’archives familiales, d’archives d’institutions, tels le Musée gréco-romain ou les ordres religieux d’Alexandrie, ou d’archives professionnelles (plans d’architecte, archives d’archéologues /antiquaires). L’intégration du CEAlex dans le GIS MOMM devrait permettre de mieux faire connaître nos ressources et de susciter des nouvelles recherches.